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La malchance n’explique pas la hausse des cancers chez les jeunes

Devra Davis

Est-ce juste un malheur qu’un jeune homme qui utilise son cellulaire des heures par jour depuis l’âge de 8 ans soit diagnostiqué avec un cancer du cerveau mortel à 23 ans? Ou qu’une jeune femme de 21 ans développe soudainement plusieurs cancers du sein directement sous les antennes du téléphone qu’elle a porté dans son soutien-gorge? Ou qu’un homme de 24 ans développe un cancer du rectum près de la poche arrière de son jean, maintenant marquée du contour de son téléphone?

Reflétant les indications scientifiques croissantes de dommages causés par les radiations de micro-ondes, sept projets de loi devant la législature du Massachusetts pourraient réduire la contribution des radiofréquences émises par les appareils de communication sans fil à ces cancers inexpliqués. Informer sur pourquoi et comment réduire l’exposition à ces radiations est devenu un problème de santé publique critique dans le monde entier. Dans des pays avant-gardistes comme Israël, la France et la Belgique, les cellulaires doivent être vendus avec des casques d’écoute et des informations sur l’importance d’éloigner le téléphone du cerveau et du corps.

L’Organisation mondiale de la santé rapporte une augmentation mondiale de 13 % de l’incidence du cancer chez les enfants. Au Royaume-Uni, les taux du type de cancer du cerveau le plus malin (le glioblastome) ont augmenté chez les utilisateurs réguliers de cellulaire, tandis que les autres formes de cancer du cerveau ont diminué. Aux États-Unis, les tumeurs cérébrales malignes (gliomes) ont désormais dépassé la leucémie en tant que principale cause de décès par cancer chez les adolescents et les jeunes adultes. De plus en plus de neurochirurgiens estiment qu’une partie de cette augmentation s’explique par notre histoire d’amour avec les cellulaires.

 

Mieux vaut prévenir

Qu’il s’agisse du changement climatique ou de la consommation d’aliments contenant des pesticides, le rôle du gouvernement semble être d’insister sur la preuve que des dommages ont déjà été causés avant de prendre des mesures pour réduire les expositions. Cela met en cause le concept de base de la santé publique : mieux vaut prévenir que nuire, plutôt que chercher à guérir. En cas de succès, le Massachusetts est sur le point de rejoindre le Connecticut, le Maryland et la Californie en tant qu’États qui encouragent officiellement la réduction des expositions aux micro-ondes en utilisant les téléphones à haut-parleur et les casques d’écoute, et autres précautions pour éloigner l’appareil de notre corps.

Malgré le nombre croissant d’études scientifiques, l’industrie du téléphone cellulaire a longtemps essayé de garder secrets les dangers de cette technologie pour la santé – allant même jusqu’à miner le rôle de l’Organisation mondiale de la santé dans le processus. Mais tout cela change aujourd’hui.

Le US National Toxicology Program vient de publier le rapport final sur une étude de 25 millions de dollars qui a exposé les rats à de faibles niveaux de rayonnement cellulaire pendant deux ans. Les animaux exposés ont développé des lésions de l’ADN et des cancers très aggressifs du cœur (schwannome) et du cerveau (gliome), les mêmes types de tumeurs qui augmentent chez les jeunes accros du cellulaire. Les éminents scientifiques à la tête de l’étude ont été tellement surpris et préoccupés par ces résultats qu’ils se sont sentis obligés, dès 2016, d’informer les organismes de réglementation de ce grave risque pour la santé publique. Au cours d’un examen sans précédent des résultats par des pairs, un groupe de scientifiques de l’industrie et d’universitaires réunis de manière indépendante a conclu que l’étude montrait « des preuves évidentes de cancer ».

Les implications du monde réel sont très simples : si vous porter votre cellulaire contre votre tête, à la ceinture, dans une poche ou votre soutien-gorge, votre corps pourrait absorber 300 à 400 % plus de rayonnement que ne le permettent les limites réglementaires jugées désuètes parce qu’elles ne visent qu’à éviter l’échauffement des tissus à court terme (et font fi des effets chroniques à long terme, comme le cancer). En fait, les tests du gouvernement français, publiés grâce à une poursuite du médecin Marc Arazi qui dirige l’association Alerte Phonegate, ont révélé que neuf téléphones sur dix, y compris l’iPhone 5 et 250 autres modèles, dépassaient de 2 à 5 fois les limites actuelles d’exposition aux radiations cellulaires.

Pour réduire le fardeau croissant du cancer chez nos jeunes, nous devons veiller à ce que le droit de savoir l’emporte sur le droit au profit. Le sénateur de l’état du Massachusetts, Julian Cyr, défend ce droit fondamental en demandant que les systèmes de test de téléphones portables et les normes d’exposition obsolètes soient modernisés avant que la « malchance » n’atteigne notre jeune génération. Que cette révolution importante de la santé publique commence.

Devra Lee Davis est un scientifique et écrivain primé, professeur invité de médecine à l’université hébraïque et à l’université Ondokuz Mayis de Samsun, en Turquie, et président de Environmental Health Trust. www.ehtrust.org